Dans l’industrie de la mode en France, les lois et réglementations jouent un rôle crucial en définissant les normes environnementales, sociales et économiques. Elles visent à promouvoir la transparence et à réduire l’impact environnemental de notre industrie. Des réglementations sont également en place pour favoriser la durabilité et réduire l’impact tout au long du cycle de vie du produit en encourageant l’utilisation de matériaux recyclés, recyclables et certifiés, ainsi que des pratiques de production respectueuses de l’environnement et de l’humain. Le non-respect de ces lois et réglementations peut entraîner des sanctions financières sévères pour les entreprises. Cet article examine les sanctions associées à la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC), à la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), ainsi qu’à la promotion de pratiques commerciales et d’allégations environnementales et sociales trompeuses, communément appelées greenwashing ou écoblanchiment.
Les sanctions liées à loi AGEC
La loi AGEC adoptée en février 2020, a instauré différentes mesures pour passer progressivement d’une économie linéaire à une économie circulaire.
Les mesures à retenir :
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Premièrement, la réduction de l’utilisation des plastiques à usage unique. Le saviez-vous ? En France, la production d’emballages plastiques représente 1,1 million de tonnes et seulement 24% sont convenablement recyclés [1],
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Deuxièmement, l’interdiction de la destruction des invendus non-alimentaires avec l’article 35,
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Ensuite, l’obligation de la double signalétique « Triman et Info Tri » avec l’article 17 [2]. Les producteurs sont tenus d’afficher sur leurs articles des instructions de tri ou de gestion des déchets, accompagnées du logo Triman pour tous les articles textiles et chaussants mesurant plus de 10 cm2 [3],
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Pour terminer, l’obligation de la transparence sur l’ensemble de la chaîne de fabrication et la traçabilité environnementale du produit avec l’article 13. Le consommateur doit être informé des qualités et caractéristiques environnementales d’un produit (pourcentage de matières recyclées, la présence de substances toxiques, le rejet de microplastiques…) [4]. Ces informations doivent être accessibles et mises à disposition gratuitement pour le consommateur.
Ces informations concernent l’impact du cycle de vie du produit sur la planète. La loi AGEC pousse les acteurs du textile à repenser leurs pratiques et à adopter des approches plus durables.
Quelles sont les sanctions possibles si non-application ?
La sanction encourue dépend de l’article concerné. Dans la majorité des cas, le manquement à l’une des obligations posées par la loi AGEC est puni d’une amende pouvant s’élever jusque 15 000 euros, ainsi qu’une astreinte pouvant atteindre 20 000 euros par jour.
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Les sanctions liées à la CSRD
Depuis le début de l’année 2024, l’entrée en vigueur de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) marque un tournant majeur dans le cadre réglementaire européen. Cette directive, qui succède à la Non Financial Reporting Directive (NFRD), impose aux entreprises de divulguer des informations essentielles concernant leurs performances Environnementales, Sociales et de Gouvernance (ESG). Ses principaux objectifs sont de placer les informations de durabilité sur un pied d’égalité avec les données financières, de standardiser le reporting de durabilité, de garantir la qualité, la fiabilité, la comparabilité et la transparence des informations, ainsi que d’orienter les flux d’investissement vers des activités plus durables.
Au cœur de la CSRD se trouve le concept de « double matérialité », exigeant des entreprises d’une part qu’elles évaluent les impacts de leurs activités sur leur environnement et d’autre part, qu’elles identifient les impacts générés par leur environnement sur leurs performances financières.
Les normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) fournissent un cadre méthodologique pour structurer les informations ESG, en indiquant quelles données qualitatives et quantitatives doivent être fournies.
À noter que la Commission européenne a adopté le 14 avril 2025 la directive dite « Stop-the-Clock », un mécanisme suspensif. De fait, l’entrée en application des obligations de reporting est reportée de 2 ans pour les grandes entreprises (vague 2) et les sociétés cotées (vague 3).
Les sanctions encourues si non-application, en vertu de l’ordonnance adoptée en France, sont :
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Une amende de 3750 euros en cas de non-publication du rapport ou de publication d’informations partielles ou erronées,
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Une amende de 30 000 euros et jusqu’à 2 ans d’emprisonnement en cas de non-audit du rapport extra-financier,
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Enfin, une amende de 75 000 euros et jusqu’à 5 ans d’emprisonnement en cas d’entrave aux vérifications ou contrôles des auditeurs [6].
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Les sanctions liées au greenwashing
Le greenwashing ou écoblanchiment se définit comme une méthode de marketing consistant à communiquer auprès du public en utilisant l’argument écologique. Le but du greenwashing étant de se donner une image éco-responsable, assez éloignée de la réalité. (définition novethic)
Bien que ce terme n’est pas mentionné dans les Codes, sa pratique reste interdite notamment en vertu du principe de l’interdiction des pratiques commerciales trompeuses, mais également en vertu de la loi AGEC.
Concernant les pratiques commerciales trompeuses, l’article L.121-2 et suivants du Code de la consommation sanctionne les entreprises faisant croire à tort qu’un produit ou service est respectueux de l’environnement ou plus vertueux qu’il ne l’est réellement.
Ces entreprises risquent jusqu’à 300 000 € d’amende, portée à 1,5 million € pour une personne morale (ou 10 % du chiffre d’affaires annuel moyen, si ce montant est plus élevé) ainsi que jusqu’à 2 ans de prison (pour personne physique). De plus, ces entreprises recevront des injonctions de cessation de la publicité trompeuse
Concernant la loi AGEC, l’article 13 de cette dernière précise l’interdiction de toute allégation environnementale.
« Une allégation environnementale est une mention qui valorise tout ou une partie d’un produit pour ses caractéristiques environnementales. Cette allégation peut être visible sur l’emballage, sur l’étiquette ou sur la publicité du produit [9]. »
Par exemple, il est interdit d’utiliser l’allégation « biodégradable », « respectueux de l’environnement » et autres si ce n’est pas vérifiable. En effet, une allégation doit être fiable, ne doit pas être trompeuse et doit également être vérifiable.
Depuis janvier 2023, la DGCCRF contrôle les acteurs concernés par l’article. La sanction encourue en cas de manquement peut s’élever jusqu’à 15 000€ pour une personne morale.
En outre, le Code de l’environnement stipule qu’il est « interdit d’affirmer dans une publicité qu’un produit ou un service est neutre en carbone ou d’employer toute formulation de signification ou de portée équivalente » à moins que l’annonceur ne puisse aisément le prouver publiquement avec un bilan d’émissions de gaz à effet de serre, une démarche réelle de réduction prévue des émissions et les modalités de compensations des GES fiables [10].
Pour une personne physique, la sanction est de 20 000 euros. Quant à une personne morale, la sanction peut aller de 100 000 euros à la totalité du montant des dépenses consacrées à l’opération [11].
Conclusion
En conclusion, les lois et réglementations qui régissent l’industrie de la mode en France jouent un rôle crucial dans la promotion de la transparence et la responsabilité des entreprises. Les sanctions qui en découlent incitent les entreprises à adopter des pratiques responsables. Celles-ci peuvent contribuer à construire un secteur de la mode plus responsable et plus durable, tout en évitant les conséquences financières des sanctions en cas de non-conformité.
Références
[1] One Heart, Seuls 9% des déchets plastiques produits dans le monde sont recyclés, selon l’OCDE, 10 mars 2022
[2] Trace for Good, Article 17 de la loi AGEC : la nouvelle signalétique Triman et info-tri de la filière textile, 13 mars 2023
[3] Textile Addict, Loi AGEC, une loi anti-gaspillage pour une filière mode et textile plus transparente, 28 février 2023
[4] Trace for Good, Article 13 loi AGEC – qu’est-ce qui a changé en 2023 pour les marques de l’industrie textile ? 20 décembre 2023
[5] Ecologie gouv, La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, 4 avril 2024
[6] Sami, Tout sur la CSRD : les obligations de reporting extra-financier, 19 mars 2024
[7] Code de la consommation, article L121-2, 2° b) e)
[8] Code la consommation, article L132-2
[9] Economie gouv, Allégations environnementales : ce qu’il faut retenir, 20 septembre 2023
[10][11] Code de l’environnement, article L229-68 et article L229-69
Publié le 15 avril 2024, Mis à jour le 16 mai 2025